Article de presse pour l’exposition FARB 2013
Autant le dire d’emblée, raconter le chemin, les recherches, puis l’évolution vers l’art aujourd’hui cinétique de Scalbert, bref, l’ensemble de sa carrière nécessiterait bien plus de lignes que la petite présentation qui suit, mais que je vous prie de comprendre comme une invitation, mieux, une réelle insistance à visiter absolument, que dis-je, impérativement son exposition à la FARB à Delémont, encore ouverte jusqu’au 17 novembre prochain.
Car si en art, l’obligation d’innover est bien réelle pour ne pas sombrer dans l’anonymat, voire l’oubli le plus total, cette innovation a malheureusement trop souvent débouché sur la laideur, pour ne pas dire l’absurdité complète. Comme je le disais autrefois dans un pauvre jeu de mots, on parle de Beaux-Arts. Et non pas de laids arts.
Avec Jean-François Scalbert, on se situe « ailleurs ». Le terme génial semble faible, car l’ingéniosité de l’artiste est sans limite. Génie nécessaire puisque comme son nom l’indique, l’art cinétique implique le mouvement.
Reprenons pour mieux saisir la démarche de Scalbert un extrait de la préface que j’avais écrite dans sa brillante monographie « Du pantin au hasard », qui vient de sortir de presse. (…) Ses premières années sont marquées par la disparition de sa sœur ainée : il en gardera une angoisse prononcée pour le figement que la mort impose et s’intéressera dès lors à toutes sortes d’activités ou d’inventions impliquant le mouvement. (…) Ceci explique presque complètement l’art de Scalbert aujourd’hui.
Ici, plus de dominante figurative ou abstraite, juste un jeu fascinant de rouages, d’engrenages, de fils, de poulies et autres ressorts, mais tout ça bien dissimulé à l’arrière de l’œuvre, jeu qui aboutit à une hallucinante beauté, à une poésie sans fin. Et puis aussi, il y a le son. Sans être les boîtes à musique, les pantinophones ou girophones de ses débuts, les tableaux exposés émettent pour la plupart des sons (parfois volontairement dissonants), empruntés certes à la musique, mais aussi et surtout à la nature et à ses bruits, à la vie et à ses symboles. Voyez « Je vouloir aimer vous », ou « on en revient », et dans un autre registre « Serjoint » où les fragments mobiles composent, mais à un seul moment précis, un visage plutôt connu. Ou encore cet étonnant champ de riz dans lequel une spirale de sillons se creuse toutes seule comme par magie, par magie.
L’artiste le disait dans une récente émission de télévision, « je fabrique des machines qui ne servent à rien. » Faux, Monsieur Scalbert : vos machines déclenchent chez le spectateur une indicible mais ô combien perceptible émotion.
Si ce qui précède a l’air quelque peu obscur, un seul conseil : visitez son exposition. Les questions s’effaceront laissant la place à une extraordinaire poésie, qui se chante comme un hymne à la vie.
PA Beuchat, nov.2013